A propos de l'Ukraine, il existe une idée reçue bien ancrée parmi les hommes politiques français : l'idée qu'il « ne faut pas contrarier les Russes » en nouant des relations trop étroites avec ce pays qui est « dans leur zone d'influence ». Cette idée est nourrie par une peur ancienne, cultivée depuis un gros demi-siècle. Elle est aussi nourrie par l'illusion d'un équilibre à respecter entre les intérêts géopolitiques. Mais cette vision n'est-elle pas aujourd'hui dépassée ?
La France et l'Allemagne étaient en 2008 les deux pays les plus opposés à l'entrée de l'Ukraine et de la Géorgie dans l'OTAN. Avec cette même préoccupation de ne pas irriter la Russie. Pour préserver aussi leur confort énergétique et ne pas remettre en question leurs approvisionnements en gaz.
Un égoïsme politique contre des principes déclarés. Cette reculade, a été comprise par Moscou comme une victoire sur les Occidentaux et par Kiev, comme une preuve de faiblesse et d'hypocrisie. Mais ce choix de la conciliation avec Moscou est-il le plus à même de renforcer la sécurité européenne ?
Certainement pas. Il y a peu de chances, en effet, que la guerre du mois d'août ait eu lieu si, lors du sommet de Bucarest en avril, la Géorgie et l'Ukraine avaient reçu le Plan d'action pour adhérer à l'Otan. Même si la perspective d'adhésion n'obligeait pas les pays membres du Traité de l'Atlantique Nord à protéger militairement les futurs coalisés, le symbole d'appartenance à la même famille était assez fort pour être dissuasif. Son absence, au contraire, encourage Moscou à employer encore et encore le langage de la force brute. Cette tendance, est-elle vraiment de l'intérêt des Français ?
Ce n'est pas sûr. Car l'habitude de reculer ne laisse pas une marge de discussion confortable. Le 19 décembre, les Etats-Unis ont signé avec Kiev une Charte de partenariat stratégique. Unilatéralement, sans attendre les autres membre de l'OTAN.
Le symbole est moins fort que ne l'aurait été la promesse d'adhésion. Mais il est très important pour l'Ukraine qui se sent en grande insécurité face à la Russie de Poutine et Medvedev. Faut-il expliquer cela par la proximité trop étroite des Etat-Unis et de l'Ukraine ?
Cela reviendrait à focaliser sur les conséquences et non sur la cause. Car l'Ukraine se cherche des alliés partout en Occident, mais ne les trouve pas ailleurs qu'en Amérique du Nord. Cette charte entre Kiev et Washington est surtout la preuve d'une absence de la politique européenne commune vis-à-vis de l'Ukraine et de la Géorgie.
Auteur:
Alla Lazareva