Quand et comment avez-vous décidé d'embrasser une carrière politique ?
Très tôt, j’ai eu à cœur de participer à « la vie de la cité ». Je suis ainsi devenu à 21 ans conseiller municipal de mon village en Normandie. Après avoir cessé toute activité politique pendant une quinzaine d’années en raison de mon implication dans l’entreprise que j'avais créée, j’ai ressenti à nouveau le besoin de m’engager au niveau local puis national.
Depuis quand présidez-vous le groupe France-Ukraine au Sénat ?
Je préside le groupe France-Ukraine du Sénat depuis le dernier renouvellement sénatorial, soit depuis le 25 septembre 2011. A l’issue de ces élections, les responsabilités au sein du Sénat ont été réparties entre les sénatrices et sénateurs. C’est ainsi que j’ai succédé à la présidence de ce groupe d’amitié à mon collègue Raymond Couderc.
Pourriez-vous nous présenter le groupe France-Ukraine, ses objectifs ainsi que les principaux axes autour desquels se structure son activité ?
Les groupes interparlementaires d’amitié ont pour rôle de créer et développer une relation de confiance avec nos collègues parlementaires des pays concernés, et de nous faire mutuellement bénéficier de nos expériences par des rencontres, des échanges, et par la mise en place de coopérations. Ils permettent de mieux connaître la situation des pays avec lesquels des relations parlementaires ont été instaurées, et favorisent le rayonnement de notre pays, notamment en matière économique, commerciale et culturelle. Le groupe d’amitié France-Ukraine du Sénat a donc pour but de rapprocher les parlementaires ukrainiens et français, mais également de permettre aux sénateurs d’être actifs dans le domaine de la diplomatie parlementaire. Il se tient alerté des évolutions économiques et politiques en Ukraine et souhaite que la France accroisse ses relations avec ce pays.
Si l’Ukraine a remporté le double défi organisationnel et médiatique de l’Euro 2012 en raison, notamment, d'immenses investissements, comment, selon vous, le pays va-t-il gérer le retour à la réalité ?
Si les retards pris initialement dans les travaux d’infrastructures ont pu faire naître des craintes quant au bon déroulement de cette compétition, il apparaît a posteriori que l’Ukraine a bel et bien remporté le défi organisationnel qui se posait à elle. D’un point de vue médiatique, cet évènement a permis de parler de l’Ukraine au-delà de la seule compétition sportive. Quant au retour à la réalité, il est dans les mains de l’Ukraine. A elle de transformer ce coup de projecteur en une véritable dynamique économique, touristique, en profitant notamment des lourds investissements infrastructurels engagés.
Que vous inspire l'acharnement judiciaire dont est l’objet Ioulia Timochenko ?
La question de la détention de Madame Timochenko soucie fortement les membres du groupe d’amitié. Ils ont d’ailleurs reçu à leurs demandes l’ambassadeur d’Ukraine en France pour le lui dire. Au-delà, ce jugement doit interpeller l’Europe. Le procès de Mme Timochenko, qui est aujourd’hui le plus médiatisé, ne doit pas masquer un problème plus large. Le pouvoir ukrainien actuel semble décidé à lutter contre son opposition hors du champ démocratique, notamment en privant ses principaux leaders de concourir aux prochaines élections.
Dans ce contexte, considérez-vous l'intégration européenne de l'Ukraine comme un horizon de plus en plus lointain?
L’Ukraine semble faire face à un vrai tiraillement. Partagée entre un souhait de rapprochement avec l’Europe et sa proximité de fait avec la Russie, l’Ukraine ne pourra rêver d’Europe qu’après avoir tourné le dos aux pratiques actuelles de son gouvernement qui ne permet pas à l’opposition de participer librement au jeu démocratique. Si des coopérations renforcées avec l’Union Européenne sont souhaitables, un processus d’adhésion à l’Union implique un nombre de pré-requis importants auxquels l’Ukraine ne semble pour le moment pas disposée à se conformer.
Voltaire a mis en exergue l'aspiration de l'Ukraine à la souveraineté tandis que Victor Hugo et Théodore Géricault ont célébré la gloire de Mazeppa, héros de l'indépendance. Comment expliquez-vous la fascination de ces grands hommes pour la cause ukrainienne ?
L’Ukraine fascine les grands hommes car son histoire en a fait l’enjeu d’Etats et d’Empires rivaux pendant des siècles. Malgré cette lutte d’influence dont elle a tour à tour été l’objet ou le prétexte, elle a su tracer sa voie, faisant de la langue ukrainienne un outil de revendication. La renaissance de la culture ukrainienne au XIXème siècle, et les censures dont elle a fait l’objet, en est un exemple particulièrement intéressant.
Pierre Beregovoy est le plus illustre des Français d'origine ukrainienne, que vous inspirent son parcours et son engagement politique ?
Son parcours est exemplaire à plus d’un titre. C’est un engagement sans faille au service de la France à qui il a consacré sa vie, des heures difficiles de la résistance jusqu’à Matignon. Qu’un fils d’immigré, fraiseur à 16 ans, gravisse un à un les échelons pour atteindre les plus hautes responsabilités de l’Etat honore notre République et montre qu’elle sait encourager les talents, d'où qu'ils viennent, et favoriser leur épanouissement et leur réussite. C’est ce que je retiens de ce parcours qui, je crois, constitue encore aujourd’hui un exemple.