L’Ambassade d’Ukraine et le Ciné-club ukrainien
Mardi 2 novembre 2010, 19h, à l’Espace culturel de l’Ambassade
22, av. de Messine, M° Miromesnil, tel. 01 43 59 03 53.
Entrée libre.
LES SURVIVANTS ( ЖИВІ )
vosta
Projection suivie d’une intervention de Mark Edwards, producteur.
Production : Lystopad Film, 2007, 75 mn. coul.
Scénario : Serhiї Boukovskyi, Serhiї Trymbatch, Victoria Bondar, Evhenia Kravtchouk
Réalisation : Serhiї Boukovskyi
Assistant : Valentyna Selentieva
Photographie : Volodymyr Koukorentchouk
Cadreurs : Pavlo Kazantsev, Roman Yelenskyi
Montage : Alexandre Soukhov
Son : Igor Barba, Heorhiї Stremovskyi
Directeur de production : Maryna Cheloubska
Coordination : Olga Soulimenko
Régie : Serhiї Zakharov
Genre : documentaire
Récompense : Grand Prix de Genève, Forum International Médias Nord-Sud de Genève, septembre 2009.
Synopsis
Couvrant la période tragique de 1932-1933, ce documentaire est basé sur les observations de Gareth Jones, jeune journaliste gallois qui se rendit illégalement en l’Ukraine en mars 1933. Le récit est tissé de témoignages de ceux qui, dans leur enfance et dans l’attente de la mort, ont survécu à la Grande Famine.
Opinion
Le film commence sur des images du président Victor Youchtchenko déambulant avec sa fille dans un bosquet, lieu de sépulture anonyme des gens du village de Kojoukhivka, morts pendant les années tragiques de la Grande Famine. Il se termine par le vide laissé par d’ultimes témoins oculaires rappelant qu'il n'y aura bientôt plus personne pour évoquer les horreurs de la Famine.
Agrémenté de documents d’archives parfois inédits (SBU, Croix Rouge, Archives nationales de Pologne, de l’Italie ou privées), ce documentaire est aussi un hommage à Gareth Jones qui parcourut à pied un territoire officiellement fermé aux étrangers et exposa au monde, de manière fiable et impartiale, les raisons de la famine. Considéré comme observateur indépendant et gênant, il sera assassiné dans des circonstances mystérieuses en 1935 en Mandchourie. La découverte tardive, en janvier 1990, de ses carnets de voyage et articles au vitriol permit aux chercheurs et historiens d’établir de nouvelles passerelles cognitives sur le Holodomor et de conscientiser l’opinion publique.
L’idée de réaliser un film sur le Holodomor avait été émise par le président Victor Youchtchenko, en 2006, à l’issue de la première du film de Serhiї Boukovskyi Spell your name, qui traitait de la Shoah en Ukraine ( lors des recherches de témoignages se référant à ce dernier film, plusieurs témoignages avaient été enregistrés sur la Grande famine ). À vrai dire, bien avant que cette idée ne soit soufflée en direction de Steven Spielberg présent pendant la cérémonie, cette remarque avait été exploitée dès 1989 par l’acteur Mykola Ichtchenko à la sortie du film Le Songe du même Boukovskyi. En 2008, le producteur d’origine américaine Mark Edwards confia à Serhiї Boukovskyi, chef de file des documentaristes ukrainiens, la réalisation de cet opus reposant sur de nouveaux éléments mais encore sur les antagonismes politiques existant dans l’Europe des années 30. Plus que tout autre cinéaste engagé ayant travaillé sur le thème du Holodomor dans la décennie écoulée, Serhiї Boukovskyi réussit à créer le recul nécessaire à l’égard du sujet sans se risquer à faire sentir le poids des revendications nationales ou sociétales, et se gardant même d’employer le terme de génocide. Pourtant, le film ne se prive pas de couvrir d’ignominie une frange de la population autochtone qui participa aux réquisitions et aux exactions. D’une remarquable tenue conceptuelle, tel le travail sur la reconstruction de la bande son d’images d’archives, à l’instar des documentaires de Serge Loznitsa, Les Survivants s’inscrit dans la continuité de la nouvelle école documentariste ukrainienne. Présenté dans plusieurs festivals de par le monde, ce documentaire reste cependant inédit en France.
Lubomir Hosejko