Vassyl Chenderovsky est le vice-président de la société ukrainienne des sciences physiques, professeur, docteur en sciences physiques et mathématiques. Il est l’auteur de plusieurs centaines d’ouvrages, dont la trilogie consacrée aux célèbres scientifiques ukrainiens « Que la lumière des sciences ne s’éteigne jamais ». Il a publié plusieurs livres retraçant la vie et le travail d’Ivan Pulyuy ainsi que d’autres scientifiques. C’est grâce à son initiative qu’a été rééditée la Bible traduite en ukrainien par Panteleymon Koulich, Ivan Pulyuy et Ivan Netchuj-Levytsky. Il est le co-auteur de plusieurs dictionnaires de termes physiques multilingues. Par ailleurs, Vassyl Chenderovsky est scénariste de plusieurs films documentaires. Il est à l’origine de la création de divers musées, monuments et plaques commémoratives en l’honneur de scientifiques ukrainiens.
Quel était le but de votre séjour à Paris ?
Je suis venu à Paris pour retrouver les archives de Serhii Vynogradsky, fameux microbiologiste ukrainien, et non russe, comme il est coutume de dire, qui a travaillé à l’Institut Louis Pasteur plus d’une trentaine d’année. Le projet est de créer un documentaire sur la vie de ce scientifique. J’ai pu visiter son laboratoire à Brie-Comte-Robert, la ville où il est enterré. Serhii Vynogradsky a fait plusieurs grandes découvertes dans son domaine et il a notamment découvert le phénomène de la chimiosynthèse – transformation des substances dans le sol – ce qui a rendu ce scientifique célèbre dans le monde entier.
Durant 5 ans, vous avez animé une émission à la radio sur les célèbres scientifiques qui travaillaient en Ukraine et à l’étranger. En connaissez-vous d’autres qui ont laissé des traces en France ?
A part Serhii Vynogradsky, je peux citer Volodymyr Koubiyovytch qui, ayant conscience de l’importance de préserver la langue et la culture ukrainiennes, a créé l’« Encyclopédie ukrainienne », qui est aujourd’hui la bible du patrimoine historique du peuple ukrainien. Il a vécu et travaillé à Sarcelles. Beaucoup d’autres savants sont liés d’une manière ou d’une autre à la France. C’est Ivan Pulyuy, un grand scientifique, qui a découvert les rayons-X trois ans avant Röntgen. C’est aussi Mykhaïlo Ostrogradsky, mathématicien ukrainien de génie; le grand physicien Mykola Pyltchykiv, nommé « Edisson ukrainien », qui a découvert le phonographe bien des années avant les autres chercheurs et Edisson lui-même, et qui est également le détecteur de l’anomalie magnétique de Koursk ; Volodymyr Pidvysotskyj – microbiologiste, pathologiste et endocrinologue qui a fait son stage et a soutenu sa thèse à l’Institut Louis Pasteur ; Olexandr Choumliansky, fondateur de l’histologie et qui étudiait à l’université de Strasbourg, a publié une thèse sur la structure des reins qui a eu une grande renommée en Europe.
L’Ukraine traverse une crise, et par conséquent le domaine de la science est également touché. Y a-t-il du positif tout de même ?
Il est vrai que la situation n’est pas facile, surtout dans le domaine de la science expérimentale qui demande beaucoup de fonds. Mais malgré le financement insuffisant, les scientifiques ukrainiens obtiennent des réussites dans le domaine de la physique et notamment en ce qui concerne les cristaux liquides et la nanoélectronique. Ca va un peu mieux avec les recherches théoriques. Mais le problème n’est pas là. Les jeunes préfèrent aller travailler dans une banque par exemple où ils gagneront de l’argent plus facilement, plutôt que devenir scientifique. Sans oublier « la fuite des cerveaux ».
Pourquoi est-il important de retrouver toutes ses archives ?
Parce que l’Ukraine peut être fière de ses talents. Et aussi parce que les Ukrainiens ont ce péché de se sous-estimer en permanence.
Propos recueillis par Valentyna Coldefy