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7 février 2013 4 07 /02 /février /2013 22:56

Michel-Terestchenko.jpgDescendant d’une grande famille poussée à l’exil par la révolution de 1917, Michel Terestchenko est de retour en Ukraine 85 ans plus tard. Aujourd’hui il y travaille avec succès dans l’agriculture, écrit des livres, fait du mécénat et a créé une fondation. Il a accordé un entretien à Perspectives.

 

 

Quel est votre parcours personnel ? A quel moment avez-vous pris conscience de vos racines ukrainiennes?


Je connaissais déjà un peu Kiev, grâce à deux voyages familiaux réalisés en 1994 (exposition sur la famille au Musée d’Art Russe lorsque la « rue Répine » fut rebaptisée « rue Terestchenko ») et en 1998 (pour l’inauguration de la Galerie Bohdan et Barbara Khanenko après sa restauration). Mais lorsque j’ai eu la chance de découvrir notre « petite patrie » de Glukhov, le 31 mai 2002 et de visiter à la fois la merveilleuse église des Saintes Trois-Anasthasies, la crypte ou la plupart de mes ancêtres avaient été enterrés (leur tombe ayant ensuite été profanée en 1918) et la résidence familiale située juste en face de la cathédrale (devenue depuis 1932 l’Institut National des Plantes à Fibres – chanvre et lin), alors là vraiment, j’ai retrouvé nos racines familiales ukrainiennes.

 

Qu'est-ce qui vous a incité à quitter la France et à vous installer en Ukraine ?

 

A tous ceux qui me posent cette question, je fais toujours la même réponse qui est la seule vraie : je n’ai jamais décidé de moi-même de quitter la France. Simplement, les gens de Glukhov qui m’ont accueilli en mai 2002 m’ont demandé de les aider et la chaleur de leur accueil était telle que je ne pouvais refuser. J’avais le sentiment d’être reçu comme le fils de la famille parti depuis longtemps. En essayant de les aider, en amenant vers eux des partenaires pour l’Institut des Plantes à Fibres de Glukhov (liniers et chanvriers français) et des investisseurs (Champagne-Céréales, Agrogénération, Tereos,..) pour cultiver les riches terres autour des anciennes sucreries de ma famille se sont créées naturellement nombre d’obligations pour lesquelles j’ai commencé à retourner régulièrement en Ukraine et aussi bien sûr nombre d’opportunités. A tel point que j’ai ensuite très vite passé plus de temps en Ukraine qu’en France, sans doute car je m’y sentais plus utile et donc cela m’a permis d’enrichir le sens que je pouvais encore donner à cette deuxième partie de ma vie.

 

Quel accueil avez-vous reçu en Ukraine ? Comment fut interprété votre retour aux sources ?


Au début, beaucoup de gens n’ont pas compris. Je me vois encore disant au Directeur de l’Institut de Glukhov (ancienne résidence familiale) : « si nous avions de l’argent, nous vous aiderions autrement – mais ma famille, après avoir tout perdu suite à la révolution de 1917, n’est plus riche, je ne peux vous apporter que mon travail, mais je m’engage à le faire autant que je le pourrai ». Je ne pense pas que beaucoup aient alors cru à la sincérité de mes paroles… Mais maintenant je n’ai plus rien à dire car tous peuvent voir ce qui se passe. Je n’ai pas économisé mes efforts, j’ai pris tous les risques sans doute bien aidé par la bonne étoile de mes ancêtres. J’ai été jusqu’au bout de ce que je pensais être devenu mon devoir – pour ne pas dire mon sacerdoce et l’Ukraine en retour a été extrêmement généreuse avec moi. Je vis désormais à Kiev, développe mes affaires de production de fibres naturelles à partir du lin et du chanvre à Glukhov comme à Jitomir, sur les anciens territoires des sucreries familiales. Je cultive les mêmes champs que mes ancêtres cultivaient il y a plus de 100 ans et tout se passe très bien.

 

Vous avez concouru à l'arrivée d'investisseurs français en Ukraine. Quel est l'atout principal du pays ? A contrario, quel est son défaut majeur ?


Je dis souvent que j’ai finalement redécouvert le « trésor des Terestchenko », puisque la légende voudrait que ma famille ait dans le passé découvert un trésor, … mais qui n’est rien d’autre que « le meilleur peuple du monde vivant sur les meilleures terres du monde ». Et la conjonction d’un peuple expert des choses de la terre qui n’a pas perdu son âme (on dit qu’un agronome sommeille dans tout Ukrainien ou toute Ukrainienne), de longues traditions agraires, et de la permanence d’une terre aussi riche et fertile. C’est surement l’atout principal de l’Ukraine.

 

Le défaut majeur de l’Ukraine est que le pays a peur de lui-même. Tant de jeunes Ukrainiens pensent qu’ils ne pourront pas y arriver dans leur pays, qu’ils aiment pourtant beaucoup car les Ukrainiens sont toujours positivement « patriotes » ! Tant de personnes qui vivent dans un pays magnifique pensent que le ciel est plus clément sous d’autres frontières ! Tant de jeunes diplômés vont offrir leurs talents à d’autres pays qui ne savent d’ailleurs pas toujours les apprécier ! Tant de jeunes mères vont priver leur nation d’enfants dont l’Ukraine aura tant besoin demain ! Je voudrais tant que cette hémorragie s’arrête, qu’au contraire cette tendance s’inverse et que l’Ukraine devienne une terre d’immigration - comme le « Canada de l’Europe » ! J’espère que mon exemple en inspirera d’autres… c’est ma manière à moi de contribuer modestement à la reconstruction de mon pays.

 

Vous avez investi dans les filières du chanvre, du lin ainsi que du miel. Pourquoi ces choix ?


J’ai cherché des productions à la fois agricoles et écologiques, ancrées à la terre et ne dépendant pas d’une technologie trop complexe, héritières de fortes traditions nationales, porteuses d’image à l’étranger, et où l’Ukraine aurait la possibilité de devenir leader mondial. Nos fibres naturelles ukrainiennes de lin et de chanvre remplacent déjà tous les jours de plus en plus de fibres de verre, toxiques pour l’homme, néfastes pour l’environnement et non-recyclables. L’Institut de Glukhov revit non plus pour les utilisations textiles des fibres naturelles pour lesquelles l’Ukraine n’est plus compétitive face à la Chine, mais pour leurs applications techniques : pièces pour l’automobile, matériaux de construction isolants, biomasse…, dont les marchés se trouvent tout autour de l’Ukraine. Et alors que la production de fibre de verre nécessite énormément d’énergie fossile, chaque hectare que nous semons en lin nettoie la planète de 3,5 tonnes de carbone… Bientôt l’Ukraine sera le leader mondial de la production de fibres naturelles grâce à ses surfaces agraires disponibles et bien adaptées. Il se trouve que ces champs du Nord de la région de Sumy, comme les régions de Tchernigov, de Jitomir ou de Rovno sont à peu près les mêmes que les anciennes zones des sucreries de ma famille avant 1917 ! Quant au miel, il est clair que l’Ukraine est le « honeyland » mondial ! Je suis particulièrement heureux que nous soyons arrivés à obtenir l’organisation à Kiev (du 29 Septembre au 4 Octobre 2013) du grand salon APIMONDIA 2013 pour lequel tous les apiculteurs et tous les acteurs de la filière du miel viendront du monde entier visiter l’Ukraine et rencontrer ses apiculteurs. Il est certain que le goût et les qualités du miel ukrainien vont convaincre le plus grand nombre des visiteurs. Ce sera donc là-aussi une chance d’améliorer l’image de l’Ukraine dans le monde !

 

Vous avez créé la fondation Terestchenko. Qu'est ce qui a motivé sa création et quels buts poursuivez-vous?


Ayant écrit deux livres (« Le Premier Oligarque » est l’histoire de mon grand-père ukrainien et de ma famille – et « Sur les traces du trésor des Terestchenko » est le récit de ma propre histoire en Ukraine de 2002 à 2012), j’ai souhaité créer une fondation pour recevoir les droits d’auteur et les utiliser pour participer au maintien en Ukraine d’activités encore présentes dans les bâtiments construits par ma famille avant 1917 à Kiev comme à Glukhov : églises, hôpitaux, universités, écoles, bibliothèques, musées… Ils ont construit tant de belles choses, qui pour la plupart sont encore là de nos jours mais nécessitent restauration et soutien ! De plus, le but final de cette « Terestchenko Heritage Foundation » est de redonner à mes ancêtres une dernière demeure respectable et de rassembler dans la terre de notre « petite patrie » de Glukhov tous les membres de la famille morts en exil de par le monde et souvent enterrés isolément (comme mon grand-père sur les hauteurs de Monte-Carlo). La tombe familiale de Glukhov où étaient enterrés Arteme et sa femme Euphrosine, Nikola et sa femme Pélagie (mes arrière-arrière-grands-parents), et Fiodor Terestchenko, a été profanée en 1918 et jamais reconstruite depuis. C’est mon devoir de retrouver leurs restes dans le sous-sol de cette crypte et de reconstruire leur tombe proprement - mais je ne sais si j’y arriverai tout seul d’où l’utilité de cette Fondation.

 

Vous avez obtenu l'engagement de plusieurs mécènes français dans divers projets en Ukraine (rénovation de l'hôpital pour les enfants malades de Kiev, échange d’expériences entre infirmières puéricultrices des deux pays etc). Quelle est votre motivation et quels résultats escomptez-vous ?

 

Malheureusement cela reste très modeste, à la hauteur de mes droits d’auteur et de mes actuels revenus en Ukraine. Mais là-aussi j’espère que cela servira d’exemple et d’entraînement pour faire toujours plus. Le monde de la santé en Ukraine est malheureusement aujourd’hui dans un état déplorable. Il me fait peur. La situation est très critique et c’est sûrement là où l’Ukraine a le plus besoin d’aide aujourd’hui. L’Ukraine est un grand pays européen mais malheureusement sa médecine héritière du système soviétique est au niveau d’un pays pauvre du Tiers-Monde. Et ce malgré les compétences personnelles et le dévouement extraordinaires de certains médecins ukrainiens, mais qui n’ont pas les moyens de travailler normalement dans un environnement très corrompu et ont donc une forte tentation de s’installer à l’étranger. La meilleure manière d’aider aujourd’hui l’Ukraine est d’aider la médecine. Car, comment peut-on vivre confortablement dans un pays ? Comment peut-on envisager d’y faire des enfants, si l’on ne peut avoir confiance dans les maternités, les hôpitaux ou les docteurs ? C’est une urgence aujourd’hui, sans doute la plus grande urgence pour l’Ukraine. L’exemple que mes ancêtres ont donné en fondant des hôpitaux gratuits et efficaces dans toute l’Ukraine avant 1917 est donc sûrement pour moi la plus grande inspiration. Je voudrais qu’elle le soit aussi pour tous les riches Ukrainiens contemporains.

 

En Ukraine, vous avez publié deux livres. Le premier est consacré à votre grand-père qui fut ministre des affaires étrangères et ministre des finances du gouvernement provisoire de la Russie en 1917 et le deuxième à votre retour en Ukraine. Seront-ils publiés en France ? Avez-vous d'autres ouvrages en préparation ?

 

Je pense que le premier livre – « Premier Oligarque » - déjà publié en Ukraine avec un certain succès en langue ukrainienne et en langue russe (les deux versions sont d’ailleurs en vente à la Librairie Russe de la Rue de la Montagne Sainte-Geneviève à Paris), sera bientôt disponible en français et en anglais. En tous cas, j’ai déjà signé avec la maison hollandaise « Glagoslav Publications » un accord en ce sens. Je viens de commencer un troisième ouvrage car, mes champs étant recouverts par la neige et l’hiver en Ukraine étant long, je profite du repos hivernal pour m’essayer à l’écriture. Il s’agira d’une pièce de théâtre retraçant en cinq tableaux les cinq dernières années (de 1917 à 1922) de la vie de ma grand-tante Barbara Khanenko (née Terestchenko), la fondatrice du musée qui porte son nom à Kiev. Elle est la seule de la famille à avoir refusé de quitter l’Ukraine en 1918 pour tenter de protéger les collections d’art familiales de la destruction. Cette pièce « Khanenkivka » tentera d’expliquer son geste, de lui rendre hommage et de mettre en valeur l’un des plus beaux musées du monde, aujourd’hui encore à Kiev grâce à sa générosité et à son dévouement… J’aimerais que la première soit jouée à Kiev dès l’hiver prochain, mais je viens juste de commencer et cela représente un peu de travail alors je n’en suis pas certain. Mais j’essaierai de toute façon de faire, avec l’aide de la Fondation, quelque chose de bien pour le Jubilé des 100 ans du Conservatoire Piotr Tchaïkovski offert par mon grand-père à la ville de Kiev et inauguré le 3 Novembre 1913…

 

Votre grand-père s'était personnellement porté garant des emprunts russes. Que cela vous inspire-t-il ?


Il ne s’agit pas des « emprunts russes » de l’époque tsariste, mais des « Emprunts de la Liberté » absolument nécessaires pour reconstruire le pays et pouvoir continuer la guerre contre les occupants allemands en 1917, lorsque mon grand-père fut nommé Ministre des Finances du premier gouvernement provisoire après la révolution libérale de Février 1917, et qu’il trouva alors les coffres de l’Etat absolument vides. Je suis seulement fier que mon grand-père ait su rembourser tous ses créditeurs (les plus grandes banques internationales) lorsqu’il s’est retrouvé ensuite face à eux lorsqu’il dût s’exiler après 1918 en France et en Angleterre. D’autres sans doute n’auraient pas su faire face à de telles obligations. Bien sûr, il a dû tout vendre : son yacht « Yolanda » de 127 mètres de long, sa luxueuse villa « Mariposa » sur les hauteurs de Cannes,…, et il a travaillé pour ses créanciers jusqu’en 1938. Mais il s’agit de choses matérielles et donc ce n’est pas si grave. Il avait beaucoup reçu et on lui a beaucoup repris. C’est un peu une leçon pour tous les oligarques actuels et sans doute une des raisons pour lesquelles j’ai intitulé l’histoire de sa vie « Le Premier Oligarque ». Je suis seulement heureux et fier que les difficultés matérielles n’aient en rien changé sa détermination de respecter les principes de notre devise familiale « Notre Ambition est le Bien Public ». Dans une plus humble mesure, j’essaie moi aussi de m’y conformer autant que je le peux.

 

Propos recueillis par Olga Gerasymenko

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6 février 2013 3 06 /02 /février /2013 22:27

emmanuelle_armandon.jpgEmmanuelle Armandon est directrice des études de la formation en relations internationales de l’Institut national des langues et civilisations orientales (Paris). Elle vient de publier « La Crimée entre Russie et Ukraine » aux éditions Bruylant.

 

 

Dans votre rapport pour la Fondation Schumann « Relations Ukraine-Union européenne : quelles évolutions depuis l'élection de Viktor Ianoukovitch ? » vous analysez les perspectives de rapprochement  entre l'Ukraine et l'UE. A quel stade, à votre avis, en sommes-nous actuellement, et quelles sont les perspectives à moyen terme ?


A l'heure actuelle l’avenir du partenariat entre Kiev et Bruxelles est incertain et semble particulièrement compromis en raison du recul démocratique qu'on observe en Ukraine depuis l'arrivée au pouvoir de Viktor Ianoukovitch. Cela ne signifie pas que le dialogue a été inexistant depuis 2010. Au contraire, les contacts ont été nombreux et les négociations sur l'accord d'association et sur la création de la zone de libre-échange qui avaient débuté en 2007, ont bien progressé ces deux dernières années. Ces négociations sont désormais terminées et le texte de l’accord a été paraphé fin mars 2012. Ceci étant dit, aujourd'hui, on voit mal comment le processus de signature de l'accord et de sa ratification par tous les pays membres de l’UE, le Parlement européen et la Verkhovna Rada, pourrait être lancé.

 

Pensez-vous que le programme de Partenariat Oriental, qui existe depuis 2009, est efficace? Y a-t-il des résultats concrets?


Le Partenariat Oriental est révélateur de l'attention que l'UE porte à son voisinage immédiat. Toutes les initiatives prises par l’UE depuis le début des années 2000 montrent qu’elle souhaite s’impliquer davantage dans sa périphérie. Il y a d'abord eu la Politique européenne de voisinage en 2003, puis l'Union pour la Méditerranée en 2008, en enfin le Partenariat Oriental en 2009. L'Ukraine reproche souvent à l’UE d’avoir une seule et même politique à l’égard de pays dont la situation politique et économique est radicalement différente et qui n’ont pas les mêmes ambitions à l’égard de l’UE. Quoi qu’il en soit, le succès du Partenariat oriental dépendra en grande partie de l’Ukraine qui est le principal voisin oriental de l’UE, en termes de superficie, de population, de potentiel économique et politique. Par contre, il faut être réaliste, Bruxelles n’est pas en mesure d’offrir à l’Ukraine une perspective d’adhésion. D’une manière plus générale, il y a une question à laquelle il est difficile de répondre : où s'arrêtent les frontières de l'UE ? Les Ukrainiens estiment qu’ils sont culturellement, géographiquement et historiquement en Europe et que, à long terme, une fois qu’ils seront prêts politiquement et économiquement, rien ne pourra les empêcher de devenir candidat...

Cette question est un vrai problème. Pour l’instant, les dirigeants européens ne sont pas prêts à envisager l’adhésion de l’Ukraine. Il serait intéressant d’effectuer plusieurs enquêtes d’opinion pour savoir ce qu’en pensent les populations des pays-membres. Un premier sondage a été mené par l’Institut de la politique mondiale de Kiev lors de l’Euro-2012 auprès de citoyens des pays-membres de l’UE qui ont visité l’Ukraine pendant le championnat de football. Les résultats montrent que les citoyens européens sont, d’une manière générale, plutôt favorables à l’idée de l’intégration européenne de l’Ukraine, une partie d’entre eux pensant même que l’Ukraine est déjà membre de l’UE ! En France, je n’ai pas l’impression que la population soit majoritairement contre une future adhésion de l’Ukraine. Mais cela reste une impression…

 

Vous effectuez actuellement des recherches sur la politique étrangère de l’Ukraine depuis 2010. Quelles sont vos observations?


Une fois arrivé au pouvoir, Viktor Ianoukovitch a affirmé à plusieurs reprises qu'il allait mener une politique étrangère d'équilibre et établir des partenariats solides à la fois avec la Russie et avec l'UE. Il pensait donc pouvoir mener une politique à peu près similaire à celle de Koutchma dans les années 90, une politique « multivectorielle ». A mon avis, il y a deux problèmes à ce sujet. Le premier, c'est que peu de temps après l’élection de Viktor Ianoukovitch, on s'est rendu compte qu'il y avait un profond décalage entre le discours officiel (cette recherche d'équilibre extérieur) et la réalité des actions entreprises en matière de politique étrangère. La politique menée par le pouvoir (la signature de l’accord de Kharkiv, l’adoption du statut hors-bloc de l’Ukraine, la loi sur la langue russe) a conduit à un rapprochement avec la Russie…

 

Ce rapprochement avec la Russie n'a pas empêché de continuer le dialogue, mais pour l'accord de libre-échange avec l'UE il faut choisir : on peut être soit avec l'UE, soit en accord douanier avec la Russie...


Tout à fait. Et c’est là que se situe le deuxième problème. Le contexte actuel est complètement différent de celui des années 1990. Lors du premier mandat de Leonid Koutchma, la politique multivectorielle a débouché sur la signature d’un accord de partenariat avec l'UE en 1994, sur la signature en 1997 d’une charte de partenariat avec l'OTAN, et, en même temps, sur la conclusion avec la Russie en 1997 du Traité d'amitié, de partenariat et de coopération ainsi que sur la signature des trois grands accord sur le partage de la flotte de la mer Noire… A l'époque, si cette politique d'équilibre a donné certains résultats, c’est parce que le contexte international était radicalement différent. Dans les années 90, l'UE était davantage préoccupée par son futur élargissement aux pays d’Europe centrale. L’Ukraine était encore loin et l’UE avait moins d’exigences l’égard des autorités ukrainiennes. Depuis, l’UE s’est élargie et l'Ukraine est devenu un voisin immédiat. Ce que Bruxelles propose aujourd’hui à Kiev est un projet concret, un partenariat très approfondi. La signature de cet accord d’association ne sera possible que si l’Ukraine respecte un certain nombre de critères et de conditions…

 

Du côté de la Russie, elle n'est pas tout à fait la même non plus.


Bien sûr ! Dans les années 90, la Russie faisait face à de graves difficultés économiques, politiques, à la guerre en Tchétchénie, etc. A l’époque, c’est ce qui a obligé Moscou à faire des compromis avec l'Ukraine et à signer le traité et les accords de 1997. Aujourd'hui la Russie n’est plus la même. Son régime politique est de plus en plus autoritaire. Elle a renoué avec la croissance économique grâce aux ventes de gaz et de pétrole. Elle n'a pas retrouvé la puissance qu'elle avait avant, mais elle est de retour sur la scène internationale. Elle aussi, elle propose un projet concret à l'Ukraine : l’Union douanière qui doit déboucher sur la création de l’Union eurasienne en 2015. Dans le contexte actuel, l’idée selon laquelle l’Ukraine doit choisir se répand. Contrairement aux années 1990, l’Ukraine ne peut plus faire un pas vers l'Est et un pas vers l'Ouest. Cette question du choix devient donc de plus en plus sensible. Mais une autre question se pose: est-ce que l'Ukraine est prête à choisir ? Les résultats d’enquêtes d’opinion montrent notamment que la population reste très divisée sur le chemin à suivre... En même temps, il est intéressant de noter que le regard que la population ukrainienne porte sur les relations avec la Russie a changé ces deux dernières années. La population semble avoir compris que malgré toutes les concessions que l'Ukraine a faites depuis 2010 à la Russie (sur la flotte, sur la langue, sur l'OTAN etc.), rien n’a véritablement changé dans les relations avec Moscou et Kiev n’a rien obtenu en échange de tous ses efforts. Plusieurs sondages récents montrent que la population ne souhaite pas que l’Ukraine fasse de nouvelles concessions. On peut noter, par exemple, qu’une vaste majorité de citoyens, et ce dans toutes les régions, est opposée au transfert à la Russie (demandé par celle-ci) du système ukrainien de transport de gaz, et ce même si Moscou proposait une diminution des tarifs gaziers en échange.

 

La recherche de partenariat avec l'UE, c'est aussi une possibilité d'améliorer ses pratiques politiques et économiques pour l'Ukraine. La nation politique ukrainienne se forme à son rythme, mais est-ce que ce rythme interne correspond aux défis du monde moderne?


Il ne faut pas oublier que l'Ukraine est un jeune Etat. Depuis son indépendance, il y a seulement 21 ans, elle s’est engagée dans un processus de transformations qui est très complexe et nécessairement long. Ce qu’il faut aussi garder à l’esprit, c’est que la Russie d’aujourd’hui n’a elle aussi que 21 ans. L’une comme l’autre font face à des problèmes d’identité qui ne peuvent pas se résoudre du jour au lendemain. Mais une chose est sûre, c’est qu’à partir du moment où la Russie commence à vouloir dominer l'Ukraine, la population ukrainienne résiste, même les habitants qui ont des origines russes ou qui vivent dans des régions plus traditionnellement tournées vers la Russie… Autre aspect intéressant : les résultats d’enquêtes sociologiques montrent que la population la plus jeune, 18-30 ans, a un rapport au monde extérieur qui est différent de celui de la population plus âgée. Les jeunes Ukrainiens n’ont pas ou peu connu l’époque soviétique et sont par conséquent plus libres car moins prisonniers des stéréotypes du passé. Cela aura des répercussions dans les années à venir…

 

Alla Lazareva

Source « Ukrainian Week »

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5 février 2013 2 05 /02 /février /2013 09:05

Le bulletin de Février 2013 de Perspectives Ukrainiennes est disponible sur la page Archive des bulletins de Perspectives Ukrainiennes

Au sommaire:

p. 1 : Éditorial

p. 2-4 : Entretien avec Emmanuelle Armandon

p. 5-8 : Rencontre avec Michel Terestchenko

p. 9-10 : A l’affiche

p. 11 : Actualités du livre

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28 janvier 2013 1 28 /01 /janvier /2013 20:28

 

CINÉ-CLUB UKRAINIEN

ESPACE CULTUREL DE L’AMBASSADE D’UKRAINE

 

22, av. de Messine, M° Miromesnil. Tél. 01 43 59 03 53

 

Mardi 19 février 2013, 19 heures

 

Entrée libre.

 

 

 

COURTS MÉTRAGES

 

 

LA TERRE DESSÉCHÉE
(ПЕРЕСОХЛА ЗЕМЛЯ)

vostf

Production : Studio Zoloti Vorota, Cinémathèque Nationale d’Ukraine, 2004, 25 mn, coul.
Scénario : Taras Tomenko
Réalisation : Taras Tomenko
Photographie : Mykhaïlo Markov
Décors : Vitaliї Chavel
Musique : Kipras Machanausas
Son : Maxime Demydenko
Montage : Natalia Lebeda
Interprétation : Mykhaïlo Holoubovytch, Serhiї Syplyvyi, Olena Hal-Savalska, Victor Olexienko, Mykhaïlo Jonine, Oleg Primohenov, Lala Jemtchoujna, Natalia Morozova, Anastasia Kyreieva, Vitalii Chavel
Genre : drame psychologique

Libre transposition cinématographique du conte de l’écrivain colombien Gabriel García Marquez Un monsieur très vieux avec des ailes immenses, le troisième opus de Taras Tomenko, La Terre desséchée, promène le spectateur du rêve au fantasme en passant par ses préoccupations métaphysiques. Dans le désert, un homme découvre un ange avec une seule aile. Il pense à l’apprivoiser et le met en cage. L’ange devient un objet de curiosité pour les badauds. S’en suit un spectacle décoiffant où les éléments magiques et surnaturels amplifient un visuel surréaliste. Humour, sarcasme, excitation et liesse de la populace, gens du cirque portés par l’alcool et la défonce orgiaque offrent un jeu absurde dans un décor carnavalesque. À eux deux, les acteurs Mykhaïlo Holoubovytch et Serhiї Syplyvyi réalisent une performance dominée par le merveilleux. On pense au baroque fastueux et grotesque de Fellini, mais encore aux lubies surréalistes d’Illienko, immergés dans un réalisme magique et naturalisme dévoyé. Bien avant Taras Tomenko, plusieurs histoires de Gabriel Garcia Marquez avaient inspiré des cinéastes, tels Francesco Rosi (Chronique d’une mort annoncée), Mike Newell (L’Amour au temps du choléra). Pour Babylone XX, Ivan Mykolaїtchouk utilisa le langage imaginaire par le prisme de la fable, du folklore et des mythes populaires rencontrés dans le célèbre roman du Colombien Cent ans de solitude.

Lubomir Hosejko

LE PREMIER KARAOKE

(ПЕРШЕ КАРАОКЕ)

vosta

 

 

Production : Sampled Pictures, 2005, 4 mn, nb

Réalisation : Oleg Tchornyi, Hennadiї Khmarouk

Musique : Hymne National de la RSS d’Ukraine, Anton Lebedynets

Remix : Alexandre Kokhanovskyi

 

Oleg Tchornyi appartient à la génération refoulée des années 90. Remarqué dans plusieurs festivals européens pour ses courts métrages, il crée avec Hennadiї Khmarouk sa propre maison de production en 1996, la Sampled Pictures, spécialisée dans le cinéma expérimental. Le Premier karaoké reste un joyau du found footage reformaté en un montage critique sur les actualités de l’époque soviétique. Tchornyi se prête à un geste iconoclaste en exhumant la version originale de l’hymne de l’ancienne République Socialiste Soviétique d’Ukraine, exécuté par un chœur dirigé par le compositeur de l’hymne lui-même Anton Lebedynets. La bande son remixée par Alexandre Kokhanovskyi offre un effet de bootleg, enregistrement pirate en live pour des cercles d’initiés. Les paroles de la troisième strophe de l’hymne, écrites en 1949 par le poète d’obédience stalinienne Pavlo Tytchyna (Lénine éclaira le chemin de la liberté, Staline nous conduit vers des cieux lumineux) furent modifiées en 1978 par son collègue Mykola Bajane (Lénine nous emmena victorieux, d’Octobre vers des cieux lumineux). Selon l’argumentation implicite du réalisateur, Staline serait l’inventeur du karaoké. Le petit père des peuples en offrit le tout premier à la nation ukrainienne.

Lubomir Hosejko

 


LE SERMENT 

   (КЛЯТВА)
vosta

Photogramme-Le-Serment-1.jpg
Production : Université Nationale du théâtre, cinéma et de télévision, 2007, 14 mn, coul
Scénario : Maryna Vroda
Réalisation : Maryna Vroda
Décor :
Musique : Anton Babakov
Son : Macha Nesterenko
Montage : Taїssia Boїko
Interprétation : Assia Kylyvnyk, Valérie Bohdanova, Olexiї Loboda, Lessia Samoieva, Alexandre Kobzar

Le Serment est le film de fin d’études de Maryna Vroda, tourné en 2007, où l’on distingue le penchant de la réalisatrice pour l’univers de l’adolescence. C’est l’histoire d’un premier amour qui débouche sur un drame. Deux enfants, Aliocha et Assia, viennent de se jurer fidélité, mais ils sont rattrapés par la vie : Aliocha doit suivre sa famille qui déménage. À l’instar du destin d’Aliocha, l’avenir de la cinéaste restera-t-il incertain ? En 2010, l’année où elle fut assistante sur le film de Serge Loznytsia My Joy, Maryna Vroda réalisera un téléfilm (Souris, lorsque les étoiles pleurent) sous un nom d’emprunt (Margarita Krassavina). En 2011, elle obtiendra la Palme d’or du court métrage au Festival de Cannes pour Cross.
Lubomir Hosejko

 

COMMENT LES FEMMES VENDAIENT LEURS MARIS 

(ЯК ЖІНКИ ЧОЛОВІКІВ ПРОДАВАЛИ)

vosta

 

Production : Kievnaoukfilm, 1972, 9 mn 30, coul.

Scénario et réalisation: Irène Hourvytch

Photogramme-Comment-les-femmes-vendaient-leurs-maris-2.JPG

Au début des années 70,  le cinéma d’animation en Ukraine atteint un essor considérable. Les réalisateurs Yevhen Syvokigne, Volodymyr Dakhno, David Tcherkaskyi, Alla Gratchova, ont chacun leur propre style, mais leurs sources divergent rarement des traditions nationales et de l’art folklorique. Pour Comment les femmes vendaient leurs maris, Irène Hourvytch s’inspire directement d’une chanson populaire comique, sujet s’associant à la célèbre foire de Sorotchyntsi. La bande est réalisée telle une broderie courant le long d’un interminable chemin de table, amalgamant des situations entre époux les plus cocasses.

Lubomir Hosejko



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21 janvier 2013 1 21 /01 /janvier /2013 20:57

aff-metal-marioupol-1-.jpg

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12 janvier 2013 6 12 /01 /janvier /2013 23:22

emmanuel-lepage.jpgQuand et comment êtes-vous tombé dans la marmite de la BD ?


Je n’ai jamais imaginé faire autre chose! Je crois que ce désir de faire de la bande dessinée m’a toujours habité. Très tôt j’ai commencé à faire des planches de bandes dessinées et ça s’est accéléré après ma rencontre à 13 ans avec un des maîtres de la bande dessinée d’alors: le dessinateur de Spirou. Ce n’était pas le dessin qui m’intéressait avant tout mais de raconter des histoires PAR le dessin. J’ai publié dès mes 16 ans dans de petites revues locales et publie mon premier bouquin avant vingt ans. La bande dessinée c’est ma vie!

 

Pourquoi avez-vous fait le choix d'un récit de voyage et non d'une fiction pour aborder le drame de Tchernobyl ?


Je suis allé à Tchernobyl en 2008 a la demande d'une association pour témoigner sous forme d’un carnet de voyage de la catastrophe 22 ans après. Un carnet de voyage est sorti fin 2008 et les droits ont été reversés aux bénéfices de l’association " les enfants de Tchernobyl". J’ai eu envie de prolonger cette expérience sous forme d'une bande dessinée tant ce voyage m’avait bouleverse. J’étais d’abord parti sur une fiction. Plus précisément j’imaginais un accident nucléaire en France et je décrivais la vie 22 ans après. En fait je déplaçais le drame de Tchernobyl en France. Je voulais faire prendre conscience des conséquences d’un accident nucléaire dans un pays ou ce choix du tout nucléaire est présenté comme sûr. Je voulais penser l’impensable. Puis est arrivé Fukushima et soudain ma fiction était rattrapée par la réalité. C’est imposé à moi alors le récit en bande dessinée de mon voyage en Ukraine voici bientôt cinq ans.

 

Quelles sont les forces et les faiblesses de la bande dessinée pour traiter de sujets tragiques ?


Tout est possible en bande dessinée. On peut tout raconter. Contrairement à un documentaire je peux imaginer les images qui me manquent, plonger dans l’histoire, dans ma propre histoire et combler par l’imaginaire les chaînons manquants.

Couv-Printemps-Tchernobyl-web.jpg

Quel regard portez-vous sur le film de Michale Boganim "La terre outragée" ?


J’ai bien aimé et je trouve intéressant que la fiction se porte sur le drame de Tchernobyl. Une fiction permet d'incarner les personnages, les rendre plus proches de nous, entrer en empathie. Bien sûr certaines choses, après être allé sur place sont interprétées, mais quand on raconte une histoire il faut parfois "tricher" pour dire le réel mais je crois ce film juste.

 

Plus d'un quart de siècle après le drame de Tchernobyl, prélude à l'implosion de l'URSS, quelle lecture avez-vous de la citation de Voltaire : "L'Ukraine a toujours aspiré à être libre" ?


Je crois qu’il y a encore du chemin à faire pour accéder à cette liberté à laquelle votre pays aspire face à ce géant fascinant et dévorant qu’est la Russie. Mais depuis la révolution orange, vous avez mené un combat salutaire, même si ce n’est pas simple et que vous n’êtes pas à l'abri de retours en arrière. Comme dit Guevara: "Les révolutions sont des combats toujours perdants, mais toujours renaissants". Les dictateurs n’éteignent jamais l’espérance.

 

Propos recueillis par Frédéric du Hauvel

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12 janvier 2013 6 12 /01 /janvier /2013 23:05

En quoi consiste le programme « Jeunesse en action » ?

 

« Jeunesse en action » est un programme de la Commission Européenne qui a été développé pour une durée de 7 ans. Il est entré en vigueur en 2007 et est destiné à financer différents projets conduits par des jeunes : réseaux, initiatives, organisation de séminaires, journées d’études et échanges. C’est aussi dans le but de soutenir les projets du Réseau Européen des Volontaires que le programme a été créé. Il concerne les jeunes de 13 à 30 ans, mais il n’y a pas de limite d’âge pour l’organisation de journées d’études. Le budget du programme sur 7 ans est de 890 millions d’euros. Les objectifs sont nombreux : sensibilisation des jeunes à la citoyenneté européenne active, à la tolérance et à la solidarité, acceptation des uns et des autres, soutien des actions des jeunes, pour n’en citer que quelques-uns.

 

Qui peut adhérer au programme ?


Les participants sont les jeunes citoyens des pays dits programmés. Ce sont les pays de l’UE, la Suisse, mais aussi 3 pays membres de l’Association Européenne du Commerce Libre et 2 pays candidats à l’entrée dans l’UE. Les jeunes des pays partenaires voisins - il y en a environ une trentaine - peuvent également y partici-per. L’Ukraine fait partie de ces pays partenaires. Tout comme les autres pays partenaires, l’Ukraine ne peut pas initier un projet elle-même. Mais il suffit de trouver un partenaire parmi les pays programmés pour soumettre un projet commun.

 

Comment vous est venue l’idée d’organiser des journées d’études pour les Ukrainiens ?


L’idée d’une formation informelle pour les jeunes Ukrainiens nous est venue il y a un an. Nous avons soumis à l’approbation de la Commission Européenne 7 projets et tous ont été retenus. Ainsi, en 2012 nous avons pu réaliser des journées d’études au Portugal, en Norvège, en France, en Slovaquie, en Grèce, en Espagne et en République Tchèque. Nous poursuivions le but de montrer aux Ukrainiens d’Ukraine et de la diaspora comment monter des pro-jets pour la jeunesse, et de leur faire découvrir les pos-sibilités de financement des projets grâce aux fonds et aux programmes européens. Nous voulions également aborder le sujet de la diaspora ukrainienne, qui reste encore un sujet tabou pour de nombreuses personnes. Nous souhaitions créer des liens entre les jeunes Ukrainiens afin qu’ils puissent développer de nou-veaux projets communs. Autrement dit, un des objec-tifs principaux est l’activation des actions de la jeunesse ukrainienne en Ukraine même et en dehors de ses frontières.

 

Est-ce que vous constatez une différence entre la jeunesse européenne et ukrainienne ?


Il n’y en a aucune. L’Ukraine fait partie de l’Europe. Mais il lui faut encore approcher certaines valeurs eu-ropéennes.

 

Avez-vous d’autres projets en vue ?


Nous sommes en train de réfléchir aux projets qui entreront dans le cadre du nouveau programme 2013-2020. Nous savons d’ores et déjà qu’il sera quelque peu modifié, mais le principe restera le même et le budget sera encore plus important.

A suivre de près sur http://ec.europa.eu/youth

www.salto-youth.net/eeca


Propos recueillis par Valentyna Coldefy

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12 janvier 2013 6 12 /01 /janvier /2013 23:03

Le bulletin de Janvier 2013 de Perspectives Ukrainiennes est disponible sur la page Archive des bulletins de Perspectives Ukrainiennes
 

Au sommaire:

 

p. 1-2 : L’Ukraine célébrée en la Cathédrale Notre-Dame de Paris
p. 3-4 : L’Ukraine à l’honneur au festival des littératures européennes de Cognac
p. 5 : Soirée littéraire du 20 décembre 2012 (Club littéraire ukrainien)
p. 6-7 : Entretien avec Blandine Huk, co-auteur du film Métal Marioupol
p. 8-9 : Rencontre avec Youry Bilak, auteur du livre Les Houtsouls
p. 10 : Actualité du livre

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26 décembre 2012 3 26 /12 /décembre /2012 11:38

CINÉ-CLUB UKRAINIEN

ESPACE CULTUREL DE L’AMBASSADE D’UKRAINE

 

22, av. de Messine, M° Miromesnil. Tél. 01 43 59 03 53

 

Mardi 8 janvier 2013, 19 heures

 

Entrée libre.

 

 

Affiche Le Cheval qui pleure 

 

LE CHEVAL QUI PLEURE

(ДОРОГОЮ ЦІНОЮ)

vostf

d’après le récit de Mykhaïlo Kotsioubynskyi
Production : Studio de Kiev, 1957, 98 mn, coul.
Scénario : Iryna Donska
Réalisation :Marc Donskoï
Photographie : Mykola Toptchiї
Décors : Mykola Reznyk
Musique : Lev Chvartz
Son : Léonide Vatchi
Interprétation : Vira Donska, Youriï Didovytch, Ivan Tverdokhlib, Olga Petrova, Pavlo Chpringfeld, Maria Skvortsova, Stepan Chkourat, Palladiï Bilokin, Alexandre Romanenko, Fédir Ichtchenko, Kostiantyn Nemolaiev, Volodymyr Vassyliev, Ivan Markevytch, Lélia Hrehorach, Dania Volocheniouk, S. Chychkov
Genre : drame social
Synopsis
Ostap et Solomia s’aiment, mais leur seigneur décide de marier Solomia au haïdouk Stepan. Menacé de conscription, Ostap s’enfuit au-delà du Danube. Solomia part le rejoindre le jour de ses noces. Fuyant une terre inhospitalière, ils sont traqués par des patrouilles sur le Danube, puis recueillis par des tsiganes. Mais leur bonheur ne dure guère. Lors de la fouille du camp, Ostap est arrêté. Avec l’aide d’Ivan, un compatriote, Solomia décide d’enlever Ostap. Un combat s’engage sur le fleuve. Ivan et Solomia périssent. Ostap est livré aux autorités.
Opinion

 

Après avoir connu une période de disgrâce due à l’eugénisme culturel imposé par Jdanov et à l’antisémitisme ambiant, Marc Donskoï effectue, en 1953, un retour discret dans les studios de Kiev avec un sujet footballistique qui passe inaperçu, Nos champions. Hors cet intermezzo alimentaire, Donskoï livre au cinéma ukrainien deux de ses créations majeures, La Mère (1955) et Au prix de sa vie (1957). Sortie en France sous le titre Le Cheval qui pleure, cette dernière reste son œuvre sans doute la plus aboutie. Elle représente aussi la fusion panthéiste entre Mykhaïlo Kotsioubynskyi, auteur de nouvelles cinégéniques, et un cinéaste enraciné dans le terroir et la culture ukrainienne, fidèle à un style sobre, inaltéré par les fluctuations politiques et les modes. C’est dans les deux premiers plans de ce chef-d’œuvre que l’on découvre le Donskoï humaniste, féru de littératures russe et ukrainienne, liant dans son épigraphe une citation de Gorki :  « Ce que nous aimons, nous l’aimons jusque dans la mort » à celle de la poétesse Lessia Oukraїnka : « Qui n’a pas vécu dans la tourmente, ignore le prix et la force des choses, ignore que les hommes ont toujours aimé la lutte et le labeur ». L’action se déroule en Ukraine dans les années 1830, où, écrasés par le servage, les paysans fuyaient par milliers vers les vastes steppes de la Bessarabie et tombaient dans les mains des patrouilles riveraines. Fouettés, marqués au fer rouge comme du bétail, ils étaient renvoyés enchaînés aux seigneurs, enrôlés de force dans l’armée ou exilés en Sibérie.

Sous la houlette du directeur de la photographie Mykola Toptchiї, Donskoï déploie des tableaux contemplatifs au lyrisme pur, des marines et des ciels impressionnistes d’une beauté absolue. Des images baroques s’égrènent des deux côtés du Danube, avec des fêtes rituelles et foraines, accompagnées de danses endiablées. Exécuté magistralement par l’actrice Olga Petrova, le solo de la Tsigane Marioutsia s’inscrit dans les chorégraphies les plus célèbres du cinéma. Entourés de comédiens du théâtre Romen, les protagonistes Vira Donska-Pryssiajniouk (Solomiїa) et Youriï Didovytch (Ostap) transcendent chaque moment de leur amour fou dans une société plus folle encore. Le titre français du film provient de la séquence où, voleurs de chevaux peu scrupuleux, les Tsiganes décident de revendre leur dernier cheval après avoir masqué ses défauts. Le riche marchand qui l'achète découvre la supercherie et, après avoir arraché la fausse crinière, bat le pauvre cheval qui se met à pleurer. Par sa passion pour les paysages et la générosité humaine, Donskoï fait parfois penser à Mizoguchi et à Renoir, et davantage au cinéma de l’Ukraїnfilm des années 30. Novateur, son film influe sur les jeunes cinéastes, notamment sur la future École poétique de Kiev. Andriech et Les Chevaux de feu de Paradjanov en subiront l’influence initiatique la plus manifeste. Les assistants de Donskoï, Volodymyr Dovhagne et Volodymyr Denyssenko, lui devront d’avoir appris le métier sur un film où les sentiments priment sur le social.

En 1958, Le Cheval qui pleure est récompensé en Grande-Bretagne et obtient un succès commercial en France, accompagné de critiques élogieuses. Henri Agel le définira en tant qu’élégie dramatique, contée comme une légende d’un Tristan et Iseult d’Ukraine, et rangera le réalisateur parmi les romantiques apparentés à Dovjenko. Paradoxalement, en Ukraine, son chef-d’œuvre fut considéré comme un film passéiste, tant sur le plan technique qu’esthétique. Il en fut de même pour les films réalisés à cette même époque d’après les récits de Kotsioubynskyi, Aube sanglante d’Olexii Chvatchko, Sur le four de Volodymyr Karassiov et Les Chevaux sont innocents de Stanislav Komar. On crut un moment que Marc Donskoï allait reprendre le flambeau de la cinématographie ukrainienne après la mort d’Alexandre Dovjenko, survenue en 1956, mais le cinéaste fut réintégré au Studio Gorki de Moscou, où il réalisera sept films jusqu’en 1977.

 

Lubomir Hosejko

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17 décembre 2012 1 17 /12 /décembre /2012 00:14

Comment êtes-vous venu à la photo ?

 

Enfant, j'étais impressionné par les collections de timbres et de cartes postales de mon père, qui évoquaient le voyage, l'exotisme, le dépaysement. Plus encore, j'étais fasciné par les multiples photos que prenait mon père et qui tapissaient les murs de la maison. Rétrospectivement lorsque je les regarde, je suis frappé par la justesse de leur composition, notamment leur respect de la règle des tiers. La photographie m'est ainsi apparue dès le plus jeune âge comme l'art populaire par excellence et j'ai voulu maîtriser ses fondements et ses principes ; si certains se définissent comme des enfants de la télé, je me considère comme un enfant de la photo.

 

Quelles sont vos influences artistiques ?

 

Elles sont tout à la fois cinématographiques, picturales et photographiques. La première influence est une émotion d'enfant ressenti devant Bambi ; la seconde est l'émerveillement éprouvé en regardant Les Chevaux de feu de Paradjanov. Ces deux films, qui expriment la toute puissance de l'image, introduisent dans un monde où la nature devient l'art et où l'art devient nature. Je voue une admiration tant naïve qu'infinie aux maîtres de l'école flamande et à leurs oeuvres d'une transcendante luminosité, je perçois cette peinture comme un horizon indépassable. En photographie j'ai été profondément marqué par Edouard Boubat dont la célébration poétique du quotidien est un enchantement.

 

Comment vous est venue l’idée d’une immersion au coeur de la culture houtsoule ?

 

Ma famille puise ses racines dans les montagnes des Carpates ; tandis que je baignais à la maison dans une ambiance de profonde nostalgie, je grandissais dans le Bugey, massif montagneux situé entre Lyon et Genève. Il m'a semblé en conséquence exaltant de partager la vie des habitants d'un village houtsoul, terre de mes aïeux.

 

Quelle place occupent les Houtsouls dans la conscience nationale ukrainienne ?

 

Les Houtsouls apparaissent comme les témoins d'un passé immémorial ; les montagnes des Carpates sont dans la mémoire collective le sanctuaire de la résistance armée aux totalitarismes nazis puis soviétiques qui se sont abattus sur l'Ukraine. Les Houtsouls ont mené un combat pour la liberté qui force l'admiration. Ils symbolisent par ailleurs la résilience communautaire qui s'est traduite sous le régime soviétique par une très grande solidarité collective et un attachement viscéral à la culture traditionnelle.

 

L'ouvrage que vous venez de publier a connu un vif succès au salon des Littératures Européennes de Cognac. Diriez-vous qu'il s'agit d'un livre reportage, d'un témoignage ou d'un carnet de voyage ?

 

Il m'est difficile de chercher à classifier ce qui fut ma démarche ; j'ai voulu être le témoin d'une réalité, d'un quotidien en communion avec la nature. J'ai souhaité partir à la rencontre des fêtes, des coutumes et des rituels qui rythment la vie dans les montagnes depuis la nuit des temps. J'ai eu pour ambition de saisir sur le vif ces regards, ces mouvements, ces silences qui font l’âme des rencontres et le sel des échanges.

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